Respect de l’obligation de vigilance des entreprises : quels document l’acheteur peut-il exiger ?

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L’article L. 225-102-4 du Code de commerce impose aux sociétés qui emploient au moins 5 000 salariés l’obligation d’établir un plan de vigilance. Selon cet article « ce plan comporte les mesures de vigilance raisonnable propres à identifier les risques et à prévenir les atteintes graves envers les droits humains et les libertés fondamentales, la santé et la sécurité des personnes ainsi que l’environnement, résultant des activités de la société et de celles des sociétés qu’elle contrôle au sens du II de l’article L. 233-16, directement ou indirectement, ainsi que des activités des sous-traitants ou fournisseurs avec lesquels est entretenue une relation commerciale établie, lorsque ces activités sont rattachées à cette relation. »

Un contrôle facultatif…

Issu de la loi Climat et résilience du 21 août 2021, l’article L. 2141-7-1 du Code de la commande publique (applicable depuis le 4 mai 2022 en vertu de l’article 13 du décret n° 2022-767 du 2 mai 2022) dispose que l’entreprise assujettie qui n’a pas établi de plan de vigilance peut être éliminée pour ce motif.

L’exclusion est certes facultative : l’acheteur n’est donc pas tenu d’éliminer un candidat défaillant. Mais l’acheteur qui souhaiterait se porter en garant du respect de l’obligation de vigilance par les opérateurs soumis à celle-ci, dispose-t-il d’une bonne assise juridique à cette fin ?

… qui n’intervient pas au stade du dépouillement des candidatures…

En effet, le plan de vigilance des opérateurs concernés ne peut pas être exigé par l’acheteur à l’appui de leur candidature. Les documents susceptibles d’être exigés à ce stade de la procédure de passation du contrat sont définis limitativement par l’article R2143-3 du CCP :

  • attestation sur l’honneur justifiant que le candidat ne fait l’objet d’aucune exclusion de la procédure (exclusions de plein droit et exclusions facultative) ;
  • renseignements demandés par l’acheteur pour vérifier l’aptitude des candidats à exercer l’activité professionnelle objet du marché, leur capacité économique et financière, leurs capacités techniques et professionnelles (conditions de participation) : or, la liste limitative des renseignements et documents pouvant être demandés aux candidats à cette fin (arrêté du 22 mars 2019 NOR : ECOM1830221A) n’inclut pas le plan de vigilance.

… mais uniquement auprès du futur attributaire…

Le cas échéant, seul l’attributaire pressenti devrait produire le plan de vigilance – avant que l’acheteur décide d’attribuer du marché. En effet, selon l’article R2144-4 du CCP, « l’acheteur ne peut exiger que du seul candidat auquel il est envisagé d’attribuer le marché qu’il justifie ne pas relever d’un motif d’exclusion de la procédure de passation du marché ». En principe, sont ainsi visés par ces dispositions tant les motifs d’exclusion de plein droit que les motifs d’exclusion facultative.

Toutefois, les articles R2143-6 à R2143-10 du CCP, qui listent les documents justificatifs et autres moyens de preuve de l’absence de motifs d’exclusion (de l’attributaire pressenti), n’abordent pas les cas d’exclusion facultative définis par les articles L2141-7 à L2141-10. En effet, excepté la justification de l’adoption d’un plan de vigilance (qui semble incontournable si l’acheteur entend opérer cette vérification), le constat par l’acheteur que le candidat ne se trouve pas dans un cas d’exclusion facultative n’impose pas en principe que ce dernier produise un document particulier.

… sur la base de justificatif(s) non expressément défini(s) par le code.

Par conséquent, le CCP ne définit pas expressément la nature du justificatif que l’acheteur est en droit d’exiger afin de s’assurer que le candidat a respecté l’obligation résultant de l’article L. 225-102-4 du code de commerce.

Dès lors, l’article L2141-7-1 du CCP suffit-il à fonder une obligation de produire le plan de vigilance dès lors que l’acheteur l’exige, en sachant que, par ailleurs, le code de commerce impose que ce plan et le compte-rendu de sa mise en œuvre soient rendus publics par les opérateurs concernés ? Ceux-ci pourraient alors communiquer à l’acheteur les modalités d’accès public à ce document (notamment le lien URL en cas de mise à disposition dématérialisée sur le site des opérateurs). On peut le penser…

A défaut, l’attestation sur l’honneur produite dans le dossier de candidature conformément à l’article R2143-3 du CCP, par laquelle le candidat certifie, notamment, qu’il n’entre dans aucun des cas d’exclusion facultative, pourrait-elle suffire ?

Arnaud LATRECHE

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