Concessions : quelles suites réserver aux variantes non autorisées

Important

Les réponses formulées par les experts de l'Association des Acheteurs Publics dans le cadre des "questions posées aux experts" sont données à titre d'informations et ne sauraient en aucun cas engager la responsabilité de l'association.

La question

Notre collectivité a lancé une concession de service pour l’organisation de brocantes 2 fois par an.  

Les variantes n’ont pas été autorisées. 

Dans son offre, l’un des deux candidats a proposé une variante alors qu’elles étaient interdites. 

L’offre de ce candidat est-elle irrégulière dans sa totalité ou peut-on analyser son offre de base quand même ? 

Notre collectivité s’interroge également sur la position qui serait à adopter pour un marché public, si un candidat proposait une variante avec l’offre de base, alors que les variantes étaient interdites. 

L’offre de ce candidat devrait-elle être déclarée irrégulière dans sa totalité ou peut-on analyser son offre de base quand même ? 

La réponse

Le dépôt d’une offre comportant une variante alors que celles-ci sont interdites constitue une méconnaissance des conditions de la consultation susceptible d’entraîner l’irrégularité de l’offre. En marchés publics comme en concession, cette situation nécessite une analyse en trois temps :

1/ Qualifier tout d’abord le pli comportant une offre de base et une offre variante

2/ Vérifier que ce pli méconnaît effectivement les conditions de la consultation

3/ Évaluer la possibilité de régulariser cette offre.

La première étape semble pouvoir être traitée de la même manière pour les marchés publics et les concessions. Les deux autres vont varier selon le type de contrat.

1/ La qualification d’un pli contenant une offre de base et une offre variante

Dans ses conclusions sous l’arrêt CE, 27 octobre 2011, Département des Bouches-du-Rhône, 350935, Monsieur BOULOUIS estime que, pour qualifier un pli comportant une offre de base et une offre variante, « trois solutions sont possibles. La première est de considérer qu’il y a une offre unique, obligeant ainsi la commune à choisir entre [les offres]. La seconde est de dire qu’il y a une offre de base et des variantes. La dernière est d’estimer que les quatres sont irrégulières. Nous vous proposons de retenir la troisième solution qui s’appuie sur une définition de la variante donnée par votre juridiction ».

Sur la base de cet avis, la présentation d’une offre de base et d’une offre variante alors que ces dernières sont interdites entraîne l’irrégularité de l’ensemble. Cette analyse semble pouvoir s’appliquer tant aux marchés qu’aux concessions.

2/ La gestion des variantes en concession

Dans le cadre d’une Concession, il parait tout d’abord nécessaire de s’interroger sur la notion de variante elle-même. En effet, la particularité de cette procédure est de permettre aux candidats de soumettre des propositions de modifications contractuelles et de discuter, avec l’autorité concédante, des modalités contractuelles et techniques de l’exécution de la prestation.  La possibilité d’amendement a été rappelée par le Conseil d’Etat (CE, 21 février 2014, Communauté urbaine de Lyon, req. n°373159). Cette possibilité ressemble sensiblement à la notion de variante, telle qu’elle peut être connue dans les marchés publics.

Si les variantes sont expressément interdites par le règlement de la consultation et que ce dernier exclu aussi la possibilité pour les candidats de proposer des amendements, le dépôt d’une offre variante s’apparentera à une offre irrégulière.

Si le règlement de consultation interdit les variantes mais qu’il laisse la faculté aux entreprises de proposer des amendements, l’acheteur devra vérifier si le terme « variante » n’aurait pas indûment été utilisée par l’entreprise candidate et si celle-ci n’aurait pas seulement déposée une offre comportant des propositions de modifications contractuelles admises. Cette vérification s’opère notamment en fonction de la formulation des critères de sélection, des attendues au sein des offres et de la rédaction du cahier des charges.

Dans cette seconde hypothèse, l’offre sera régulière, sauf si les modifications proposées portent sur une des caractéristiques minimales de la concession (article L. 3124-3 du CCP).

Si l’offre déposée s’avère effectivement irrégulière, le principe est que celle-ci doit être écartée, sauf si elle peut être régularisée.

Or, le CCP ne prévoit pas expressément la faculté de régulariser les offres en concessions. Dans une interprétation stricte, cela signifie que toute offre irrégulière doit être rejetée et non analysée. Cette interprétation ressort de la combinaison des articles L.3124-2 (« l’autorité concédante écarte les offres irrégulières ou inappropriées ») et R.3124-6 du CCP (« les offres qui n’ont pas été éliminées en application de l’article L. 3124-2 sont classées par ordre décroissant sur la base des critères prévus »).

Dans une interprétation plus souple, il est possible de considérer que le classement des offres peut, dans certains cas, intervenir qu’à la fin des négociations et non pas lors de l’analyse des offres initiales. Pour soutenir cette interprétation, l’article R.3124-1 du CCP précise que l’acheteur qui entend négocier qu’avec un nombre limité de candidat doit engager les négociations après avoir classé les offres conformément à ses critères de sélection.

Le CCP prévoit donc expressément que les offres doivent être classés préalablement à l’engagement de négociations uniquement lors de négociations restreintes. En cas de négociations ouvertes, cette interprétation clémente permettrait d’engager les négociations avec le candidat ayant remis une offre irrégulière et de la régulariser en cours de négociation, si cette modification n’apparaît pas substantielle.

3/ La gestion des variantes en marchés publics

En marché public, lorsqu’une offre de base et une variante sont déposées en méconnaissance du règlement de la consultation, la position initiale du juge est le rejet des deux offres – solution de base et variante – (CAA de Versailles, 22 ­octobre 2015, req. n°­14VE0025).

Toutefois, la nouvelle réglementation a ouvert la possibilité de régulariser une offre irrégulière, à condition que celle-ci ne soit pas anormalement et que la modification ne soit pas substantielle.

Si le juge administratif ne semble pas s’être prononcé sur la base des textes récents, il parait légitime de penser que la régularisation serait ici permise. En effet, dès lors que la solution de base est clairement identifiée et dissociée de l’offre variante, la régularisation implique seulement, pour le candidat concerné, de confirmer le maintien de son offre de base et l’exclusion de son offre variante. L’offre de base n’étant pas modifiée, il pourrait être soutenu qu’il ne s’agit donc pas d’une modification substantielle.

Le conseil de l'AAP

En concessions, il est recommandé d’utiliser les notions de caractéristiques minimales et d’amendements contractuels en lieu et place ou en complément de la notion de variantes.

En marchés publics, il peut être utile, dans la clause interdisant les variantes, de préciser le sort qui sera réservé à un pli dérogeant à cette interdiction.

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