Dépassement du coût des travaux : le maître d’oeuvre épargné ?

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Afin de clarifier la responsabilité du maître d’oeuvre quant à son engagement sur le coût des travaux, le Code de la commande publique a été modifié par le décret 2022-1683 du 28 décembre 2022.

Dépassement du coût prévisionnel des travaux résultant des études

Dans le cadre de la mission “assistance pour la passation des marchés publics de travaux” (ACT), l’article R.2432-3 du Code impose que le maître d’oeuvre s’engage sur le coût prévisionnel des travaux, arrêté en principe à l’issue des études de projet (R.2431-27), majoré d’un taux de tolérance.

A défaut de taux défini dans les pièces particulières du marché de maîtrise d’oeuvre, l’article 13.2 du CCAG MOE fixe ce taux tolérance à :

  • 5 % pour le neuf ;
  • 10 % en réhabilitation.

A titre d’exemple, si le coût prévisionnel de travaux neufs est arrêté à 500 000 € HT, compte tenu de la tolérance de 5 % (25 000 € HT), le maître d’oeuvre s’engage à ce que le coût des travaux résultant de la passation des marchés de travaux n’excède pas 525 000 € HT.

Antérieurement à sa modification par le décret du 28 décembre 2022, le dernier alinéa de l’article R.2432-3 du code disposait qu'”en cas de dépassement du seuil de tolérance, le maître d’ouvrage peut demander au maître d’oeuvre d’adapter ses études, sans rémunération supplémentaire.”

Certains maîtres d’ouvrage avaient alors semble-t-il tendance à exiger la reprise gratuite des études dès lors que le seuil de tolérance n’était pas respecté, sans tenir compte des motifs de ce dépassement. De ce sorte que le maître d’oeuvre pouvait être sanctionné pour un dépassement qui ne relevait pas pour autant de manquements de sa part.

Par conséquent, l’article 3 du décret a utilement précisé que le maître d’ouvrage peut certes exiger la reprise gratuite des études de conception en cas de dépassement, sauf si ce dernier résulte de circonstances que le maître d’oeuvre ne pouvait pas prévoir.

C’est ce que traduit la nouvelle formulation, quelque peu absconse, du dernier alinéa de l’article R.2432-3 : “En cas de dépassement du seuil de tolérance ne résultant pas de circonstances que le maître d’oeuvre ne pouvait prévoir, le maître d’ouvrage peut lui demander d’adapter ses études, sans rémunération supplémentaire“.

Dépassement du coût des travaux résultant des marchés de travaux

Limitation apparente de la responsabilité du maître d’oeuvre aux manquement commis pendant la mission DET et les opérations de réception

Lorsque le maître d’oeuvre est par ailleurs responsable de la mission “direction de l’exécution des marchés publics de travaux” (DET) sur le même projet, l’article R.2432-4 du Code lui assigne un nouvel engagement sur le coût des travaux résultant des marchés attribués aux entreprises, lui-même assorti d’un taux de tolérance.

Le taux supplétif résultant de l’article 13.2 du CCAG MOE est de :

  • 3 % pour les constructions neuves ;
  • 5 % pour les travaux de réhabilitation.

Lorsque le maître d’oeuvre n’honore pas son engagement et que le coût des travaux révélé par le montant du décompte général définitif excède le montant toléré, une pénalité égale à 15 % maximum du montant des honoraires relatifs aux missions DET, VISA/EXE, AOR peut lui être appliquée (si le marché l’a prévue !).

Là encore, afin de limiter la sanction du maître d’oeuvre à la seule hypothèse où le dérapage du coût final des travaux lui est imputable, l’article 3 du décret du 28 décembre 2022 a précisé l’article R.2432-4 du Code : la pénalité en cas de dépassement du seuil de tolérance ne peut lui être appliquée que si le dépassement du seuil de tolérance résulte “d’un manquement du maître d’oeuvre dans ses missions de direction de l’exécution des marchés publics de travaux et d’assistance au maître d’ouvrage lors des opérations de réception.”

Cette volonté louable de ne pénaliser le maître d’oeuvre que de ses propres carences, pourrait bien avoir un effet inattendu et, espérons-le, involontaire.

Quid des manquements du maître d’oeuvre pendant ses autres missions… ?

En effet, le dépassement du seuil de tolérance sur le coût définitif des travaux peut certes être provoqué par une ou plusieurs défaillances du maître d’oeuvre pendant le suivi du chantier ou lors de la réception des travaux.

Mais la dérive du coût de l’ouvrage peut également résulter d’erreurs ou d’omissions commises par le maître d’oeuvre à l’occasion d’autres missions, que l’article R.2431-1 du Code de la commande publique distingue des missions DET et des opérations de réception, exclusivement visées par l’article R.2432-4 :

  • études de conception (études préliminaires, diagnostic, esquisses, APS, APD, PRO) ;
  • études d’exécution ou vérification de leur conformité et leur visa lorsqu’elles sont établies par les entreprises chargées des travaux (EXE/VISA) ;
  • ordonnancement pilotage et coordination du chantier (OPC) ;
  • assistance du maître d’ouvrage pendant la période de garantie de parfait achèvement.

La nouvelle formulation de l’article R.2432-4 du Code, qui semble limiter la responsabilité du maître d’oeuvre aux seuls manquement qu’il commettrait à l’occasion de la direction des travaux et pendant les opérations de réception, permet-elle au maître d’ouvrage d’appliquer la pénalité prévue si le dépassement du seuil de tolérance sur le coût définitif des travaux est provoqué par des erreurs de conception, ou des manquements commis au titre des missions EXE/VISA, OPC ou encore pendant la période de parfait achèvement ?

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